Nous sommes à l’Ouest du lac et nous marchons le long d’une route qui fonce vers le sud du pays. Attraper celle qui longe la rive sud du lac ne devrait pas nous prendre trop de temps !

Après notre mésaventure boueuse, nous souhaitons rapidement rejoindre le rivage pour y rincer nos affaires! Mais c’est sans compter sur le large détour que fait la route pour éviter la zone marécageuse…

Après une heure de marche, un véhicule s’arrête quelques mètres devant nous. Le conducteur en sort avec un grand sourire et nous fait signe de monter! Alors que nous ne faisions pas de stop, en raison de notre état, il s’arrête de lui même pour nous aider! Lui et sa femme ne parlent pas un mot d’anglais, mais Yogo transporte avec lui un document rédigé en Russe, expliquant son voyage, avec ce papier et quelques gestes, le conducteur comprend que nous souhaitons nous rendre sur la rive sud et nous dépose au croisement quelques kilomètres plus loin, ravi de nous avoir aidé dans notre périple, avant de continuer sa route vers le sud.

Si nous avons choisi la rive sud du lac, ce n’est pas par pur hasard. Les soviétiques ont développés quelques stations balnéaires le long de la rive nord, et celles-ci attirent des touristes Russes et Kazakhs. A l’inverse, la rive sud est restée sauvage et peuplée principalement de villageois vivants à travers leurs traditions et est donc plus authentique !

La même situation se répète quelques kilomètres plus loin, nous marchons et un conducteur s’arrête de nouveau alors que nous ne faisons pas de stop ! Celui-ci nous dépose directement à Ottuk, premier village sur la route sud du lac. A peine déposés, nous courrons à l’eau ! Mais ici la rive est toujours terreuse, résultat la plage est un peu marécageuse et l’eau est trouble et pleine d’algues. Nous nous baignons tout de même et surtout, nous en profitons pour laver nos affaires.

Le temps se fait soudain menaçant, nous reprenons la route mais nous décidons de ne pas faire de stop, nous nous en remettons à la sympathie des conducteurs kirghizes ! Si quelqu’un s’arrête de lui-même nous irons en voiture (ou autre), sinon nous irons à pieds !

Après avoir fait quelques courses dans une toute petite boutique à Ottuk, nous marchons le long de la route. Les paysages défilent et ne se ressemblent pas tellement, entre zones désertiques, champs d’agriculture vivrière, collines et constructions en terre, où que notre regard se pose, il y a quelque chose de nouveau à contempler.

Nous croisons un jeune garçon à cheval et il accepte de nous le prêter quelques minutes pour que nous nous y essayions. Hormis cela, la fin de journée se fera à pied. Très peu de véhicules et aucun ne s’arrête. Heureusement, les gros nuages noirs et menaçants se sont enfuis vers le nord, traversant le lac pour aller masquer les montagnes et la rive opposée. La rive nord connait un climat moins clément en règle générale, et cela semble se confirmer !

De retour sur la route, la nuit s’approche, nous cherchons un endroit pour dormir et apercevons une ferme. Comme Yogo n’a pas emporté de tente avec lui, nous décidons d’aller demander s’il est possible de dormir à l’abri quelque part dans une annexe, une ancienne grange ou autre… Alors que l’on s’approche, deux gros chiens courrent en notre direction, en aboyant de toute leur force. Intimidés, nous nous arrêtons à une quinzaine de mètres de la petite maison d’où sort une dame quelques instants plus tard, alertée par le bruit.

Elle semble surprise de nous voir, mais une fois de plus grâce au document magique de Yogo, il est très simple de lui expliquer ce que nous faisons là, elle n’a qu’a lire le texte en Russe (Langue parlé dans une bonne partie de l’Asie centrale). Nous souhaitions dormir dans un des vieux bâtiments qui entourent la maison, mais elle nous propose finalement de dormir dans sa maison. Nous voila on ne peut plus immergés dans la réalité de la vie sur les rives de ce superbe lac.

Elle nous invite à entrer à l’intérieur de la maison. Le confort y est très sommaire, table, banc, un meuble pour la vaisselle, pas de place pour le superflu, pas le temps non plus ! Ses enfants sont partis vivre en ville, et son mari étant probablement décédé, elle vit seule ici et notre compagnie semble lui faire plaisir. Nous savourons un bol de lait chaud, du pain et du beurre maison qu’elle nous offre, un repas simple et adapté à la vie de tous les jours, sans extras. La qualité des produits en fait quelques choses de particulier pour nous qui n’avons l’habitude, entre autre, que des beurres industriels sans goût, mais pour elle, c’est la routine…

Pour la remercier de son hospitalité nous l’aidons dans les tâches qui restent à faire pour la soirée : rentrer les animaux, préparer les vaches pour la traite, séparer la crème du lait fraichement récolté à l’aide d’une petite machine rudimentaire mais efficace, aller chercher de l’eau à la rivière qui s’écoule à 100 m de la maison… Ici la vie est rude ! Et je n’ose pas imaginer l’hiver, lorsque les températures tombent dans le négatif…

Après une nuit à l’abri et quelques photos souvenir avec la fermière, nous continuons notre chemin. En arrivant aux alentours de Kala-Tala, la terre a laissé place au sable le long de la rive qui est maintenant séparée de la route par de vastes steppes arides. Nous rejoignons le bord de l’eau devenue claire et limpide et suivons le rivage sur plusieurs kilomètres se baignant à plusieurs reprises dans l’eau fraiche du Issy kul!

Nous rattrapons ensuite la route principale et la suivons jusqu’au croisement avec une piste menant vers le Salt Lake ! Après un petit repas dans un magasin qui s’improvise restaurant juste pour nous, nous arrivons au panneau qui indique la direction à prendre pour rejoindre le Salt Lake. Sur le même principe que la mer morte, le Salt Lake est un lac mort, détaché de l’Issyk kul, qui s’assèche et devient de plus en plus salé, modifiant dans le même temps la densité de l’eau ! Nous souhaitons nous y rendre ! Un conducteur nous y conduira sans que nous ayons besoin de faire du stop. La route s’éloignant du rivage pour contourner des collines, il faut suivre une piste sur 11 kilomètres dans une large gorge pour rejoindre la rive du Issyk kul, le salt lake étant à proximité de celle-ci ! Nous commençons la marche sous un soleil de plomb, mais au fur et à mesure que les kilomètres défilent de gros nuages assombrissent le ciel, et la pluie ne se fait pas attendre très longtemps ! Heureusement, après deux heures de marche, nous atteignons un petit village sur la rive du Issyk kul, et il nous est possible de nous mettre à l’abri sur le pas de porte d’une maison apparemment vide !

Nous sommes un peu fatigués, il nous reste entre un ou deux kilomètres pour atteindre le lac salé, mais le temps ne nous encourage pas à continuer. Nous passons un moment assis à l’abri dans ce village peu accueillant. Nous n’avons plus d’eau, il nous faut de nouveau trouver un endroit où dormir à l’abri, mais ici, pas question de compter sur l’hospitalité des locaux, la zone est « touristique » car le lac salé est une petite attraction, du coup, Russes, Kirghizes et Kazakhs viennent s’y baigner pour profiter de ses vertus pour la peau. Ici « touristique » ne signifie pas « foule », la zone semble même plutôt déserte, mais l’activité économique est très faible dans ce coin, et les quelques personnes qui viennent ici par semaine suffisent à créer une activité touristique.

Après avoir essuyé plusieurs refus, pour le gîte, le coucher ou tout simplement pour un peu d’eau, je suis agacé et l’envie de quitter la zone me prend… Heureusement, Yogo insiste pour aller demander à une maison un peu plus loin, toute proche de la rive du Issyk kul. Je le suis, pour y arriver, il faut traverser un « pont » plus que rudimentaire, qui est en réalité une sorte de reste de structure métallique agricole sur lequel ont été disposées (mais non fixées) diverses planches de bois ou de métal. En arrivant, première bonne surprise une femme parle anglais, et première mauvaise surprise, c’est une maison d’hôte, comme les autres il est possible de rester, mais il faut payer. Dépités, nous n’avions pas envie de payer l’hébergement par ici, mais le mauvais temps, l’heure tardive et la fatigue nous poussent à accepter. Bien sur nous négocions et obtenons un prix de 4,2€/personne pour la nuit, le diner et le petit déjeuner ce qui est finalement plutôt raisonnable…

Ici les gens ne consomment que l’eau de la rivière qu’ils font bouillir avant de boire. Je ne suis pas fan de boire l’eau d’une rivière à son embouchure, mais pas le choix. La chaleur tuera les microbes, et nous espérons que personne n’ai lavé son linge en amont…

La maitresse de maison prépare des lagmans, nous pourrons voir la préparation de ces gros spaghettis, fait à la main à partir d’une pâte que l’on étire autant que possible avant de la plonger dans de l’eau bouillante et servi avec divers accompagnement à base de viande ou autre…

Après un bon repas, direction le lit, crevés, avec le temps qu’il fait, c’est la meilleure chose que nous puissions faire.

Le lendemain, le soleil est de retour et le paysage se révèle sous un jour totalement différent. Avec le soleil, la petite baie que surplombe la maison où nous sommes est paradisiaque!

De bon matin, après une baignade dans la baie, nous nous rendons au lac salé en suivant la fin de la piste qui nous a conduit ici et qui longe maintenant le lac. Juste avant celui-ci un petit village à été construit pour les “touristes”. Au bout du village, une barrière et un homme qui nous demande de l’argent pour passer et accéder au lac. Cela ne semble pas très officiel, et nous ne savons pas s’il sagit d’une escroquerie ou non. Nous refusons de payer, et l’homme nous laisse finalement passer contre la promesse que nous n’irons pas nous baigner… Mais bien sûr! Cinq minutes plus tard nous sommes en maillots de bain, prêt à sauter dans l’eau! La densité de l’eau étant plus élevée, il est très facile de flotter, faire la planche sur le dos ou sur le ventre. La pression sur la cage thoracique est plus forte et par conséquent la respiration est un brin plus fatiguante.

Lorsque l’on sort de l’eau, le sel cristallise sur notre peau et il est impossible de se rincer immédiatement. Se ré-habiller plein de sel, quel bonheur! Nous quittons le lac par les dunes pour ne pas repasser par la barrière et son “gardien” qui pourrait être n’importe qui…

Nous retournons toutefois au “village”, il est environ 13h nous avons faim, et nous souhaitons savoir s’il est possible de manger sur place. Celui-ci est composé principalement de yourthes à louer pour les touristes, mais un petit bâtiment en dur semble être un restaurant. En nous approchant, nous constatons que c’est bien un restaurant, mais qu’il est fermé. Nous faisons demi tour mais quelques secondes plus tard, un homme arrive en courant derrière nous et nous fais signe de revenir. Il nous ouvre la porte, derrière laquelle, dans une petite salle pleine de courant d’air se trouve quatres tables. Nous prenons place alors que l’homme repart en courant pour aller cherche la cuisinière… Celle-ci arrive deux minutes plus tard et nous demande ce que nous souhaitons manger. Il n’y a pas de menu, et les gens ne parlent pas anglais… Nous décidons alors de procéder autrement. Nous donnons chacun 120 Som ( Monnaie Kirghize, environ 2,10€) et laissons la cuisinière nous préparer ce qu’elle veut. Nous aurons donc le droit à une salade “Concombre – Tomate” mais surtout, nous mangerons un délicieux Dimlama végétarien accompagné de thé vert ou noir à volonté ! Un vrai régal!

Nous passons le reste de l’après midi à la plage, mais nous nous séparons, chacun son kilomètre de plage déserte, histoire d’apprécier le calme, la quiétude du lieu et de savourer notre privilège…

Lorsque nous quittons le lieux le surlendemain, nous sommes un peu tristes de quitter un tel endroit, mais nous savons que d’autres expériences nous attendent plus loin!

Nous serons très chanceux sur ce dernier morceau de route qui nous sépare de la première “grande” ville, un premier véhicule nous évitera 8 km de piste, puis un camion et une voiture se relayeront, nous laissant à peine le temps de marcher, avant d’arriver rapidement à Bokombaevo!