Trois jours à cheval dans les montagnes, et nous voila de retour à Bokombaevo. A peine tristes que cette magnifique ballade prenne fin puisque nous retrouvons le Issyk Kul qui nous avait presque manqué… La beauté des paysages, les rencontres, la découverte de la vie des bergers Kirghizes, la sensation de liberté lorsque le cheval galope dans les plaines verdoyantes sont gravées dans nos mémoires à jamais!

Dans la soirée, Joki nous jouera un air de “komuz” (guitare Kirghize) avec sa femme. Le Komuz de Joki a été abimé par la petite Eve, malgré tout il arrive à nous jouer quelque chose de très correct, accompagné de sa femme qui chante, le son de l’instrument frise un peu…

Dernière journée à Bokombaevo, nous passons une partie de l’après midi à visiter un Canyon 20 km à l’est de la maison de Joki sur la côte. Les enfants de Joki sont ravis de s’y rendre pour la première fois, eux aussi.

L’endroit est magnifique, le sable, les roches couleur corail reflètent l’aridité du lieu alors que du sommet des collines il est possible d’apercevoir le lac qu’on a du mal à imaginer si proche… debout sur un des rochers brulants, écrasé par la chaleur du soleil, l’arrière plan bleu du lac qui se confond avec le ciel parvient presque à me rafraichir.

Depuis cet endroit, si différent une fois de plus des autres paysages que m’a offert ce lac depuis mon arrivée sur ses rives, je ne peux m’empêcher de penser aux propos d’Alain sur le voyage:

[blockquote]En ce temps de vacances, le monde est plein de gens qui courent d’un spectacle à l’autre, évidemment avec le désir de voir beaucoup de choses en peu de temps. Si c’est pour en parler, rien de mieux ; car il vaut mieux avoir plusieurs noms de lieux à citer ; cela remplit le temps. Mais si c’est pour eux, et pour réellement voir, je ne les comprends pas bien. Quand on voit les choses en courant elles se ressemblent beaucoup. Un torrent c’est toujours un torrent. […] La vraie richesse des spectacles est dans le détail. Voir, c’est parcourir les détails, s’arrêter un peu à chacun, et, de nouveau, saisir l’ensemble d’un coup d’œil. Je ne sais si les autres peuvent faire cela vite, et courir à autre chose, et recommencer. […] Pour mon goût, voyager c’est faire à la fois un mètre ou deux, s’arrêter et regarder de nouveau un nouvel aspect des mêmes choses. Souvent, aller s’asseoir un peu à droite ou à gauche, cela change tout, et bien mieux que si je fais cent kilomètres. Si je vais de torrent à torrent, je trouve toujours le même torrent. Mais si je vais de rocher en rocher, le même torrent devient autre à chaque pas. Et si je reviens à une chose déjà vue, en vérité elle me saisit plus que si elle était nouvelle, et réellement elle est nouvelle. Il ne s’agit que de choisir un spectacle varié et riche, afin de ne pas s’endormir dans la coutume. Encore faut-il dire qu’à mesure que l’on sait mieux voir, un spectacle quelconque enferme des joies inépuisables. […]

Alain, Propos sur le bonheur, 1906[/blockquote]

Le soir venu, Joki nous informe qu’une célébration à lieu, ce même jour, dans la famille de sa femme pour célébrer une naissance et que nous y sommes conviés. Nous voila finalement reconduits en voiture gratuitement par notre guide jusqu’à Balykshy pour participer à une fête de famille Kirghize! C’est là toute la magie de ces pays mal connus et préservés du tourisme, bien qu’il faille payer pour les basiques, on est rapidement plus un ami qu’un “client”.

Après deux heures de route dans la petite voiture de Joki, nous arrivons chez la soeur de Bouroule. A la fois curieux, chaleureux et timides les membres de la famille nous feront rapidement nous sentir à l’aise.

Débordante de friandises, beignets et salades en tout genre, la célébration au Kirghizstan commence avec une table donnant une impression d’opulence. Mais curieusement tout est végétarien…

Gare à ceux qui ne connaissent pas les coutumes (nous en l’occurrence…), car après avoir gouté à tout ce qui se trouve sur la table difficile de ne pas être repu, mais il faudra encore manger le “Besparmak” plat dont le nom signifie littéralement “les cinq doigts de la main” faisant référence à la manière de le manger. Après deux heures de cuisson dans une grande gamelle, arrive la viande! Un mouton complet, coupé en morceau et bouillit. C’est alors l’agitation dans la maison, car ce repas se prend traditionnellement à même le sol.

Il faut retirer la table, disposer une nappe par terre, tout le monde prend place, en cercle chacun à alors le droit à son morceau de viande et des noodles qu’il faut ensuite manger à la main. C’est loin d’être simple… Mais la viande de mouton du Issyk kul, tient une fois de plus ses promesses. Naturellement salée par l’eau que boivent les animaux (celle du Issyk kul), et très tendre, c’est tout simplement un régal… lorsque vous avez le droit à un morceau de muscle, et non de gras… ou autre!

Nous dormirons deux nuit dans la famille de Bouroule avant de reprendre la route vers Bishkek nous profitons de notre présence à Balykshy pour faire un saut chez Jakou, que nous avions rencontré lors de notre premier passage à Balykshy, et lui remettre quelques photos que nous avons fait imprimer pour l’occasion. Après un ultime thé chez Jakou nous quittons la rive du Issyk Kul, retour à Bishkek en marchroutka. Une chose est sûre, cet endroit va me manquer!

En arrivant à Bishkek, je dis au revoir à Yogo que je ne reverrais probablement pas jusqu’à mon retour, ou plutôt son retour en France car nous avons dorénavant des itinéraires différents.

L’aventure en solo commence pour de bon cette fois-ci, au beau milieu de l’Asie centrale!